Michel Rollier : « en entreprise, un besoin vital de confiance, mais sans aucun angélisme »

Publié par Petrel le 09 février 2013
Dégrader, Enchanter, Témoigner

Jeudi 7 février 2013, Michel Rollier, ancien gérant de Michelin, proposait sa vision de la confiance dans l’entreprise à l’occasion d’une conférence organisée par l’ITA à Chamalières (Puy-de-Dôme). Ce dernier a rappelé l’impérieuse nécessité de la confiance au sein d’une entreprise. Et simultanément, Michel Rollier a mis en garde les auditeurs contre l’angélisme, en faisant, selon ses mots « l’éloge de la défiance« , au regard de la fragilité globale des entreprises aujourd’hui et de la faiblesse humaine face au pouvoir.
Voici, pour vous, l’essentiel de son propos.

« La confiance fait partie des sentiments humains profonds. C’est vital pour l’homme. Et l’entreprise en a aussi besoin, car elle génère de l’engagement. Pourtant, comme nous l’avons vu, l’heure est à la méfiance. Mais, il faut le rappeler, les entreprises ont aussi beaucoup fait pour détruire la confiance. Par exemple, je relevais aujourd’hui dans la presse, l’amende de plus de 600 millions de dollars que devra verser la Royal Bank of Scotland pour avoir manipulé le Libor.

Comment donc instaurer ou restaurer la confiance dans l’entreprise, même si j’ai eu toujours très peur de l’angélisme ?

Pour moi, la confiance nait du sentiment que mon chef ou mon collègue agit honnêtement et possède les compétences nécessaires. Nous avons besoin de cette double approche : compétences et moralité ou éthique.

Individuellement, différentes vertus sont nécessaires :
– La première vertu est d’avoir confiance en soi. Si vous avez confiance en vous, vous inspirerez confiance aux autres. Il faut être capable de mesurer la tâche et se sentir de l’accomplir.
– La deuxième est d’avoir du courage. Il s’agit de ne pas tricher et de reconnaître une erreur. Si on la cache, elle finit toujours par se venger.
– Il faut agir dans un souci de justice. Les injustices restent fortement ancrées dans les mémoires des salariés, même si elles ont été commises par un dirigeant qui vous a précédé.
– Une grande attention doit être donnée à l’écart entre les attentes explicites de l’entreprise à l’égard des salariés et les attentes implicites des salariés à l’égard de l’entreprise . En tant que dirigeant, on n’en est pas toujours conscient. Faire s’exprimer par écrit les salariés sur ces dernières peut être une solution pour les révéler.
– Pour finir, expliquer est essentiel. Par exemple, j’ai beaucoup amené de standardisation chez Michelin afin de limiter les pertes d’efficacité. En expliquant cela a été compris, malgré la rigueur des évolutions.

La confiance a pour fondation l’affectivité. Elle doit être réciproque et non univoque. Elle est faite de respect et en même temps de distanciation. Car il faut se garder des faiblesses humaines. Aujourd’hui, les entreprises ont une fragilité que l’on ne réalise pas toujours.

Ainsi, j’ai beaucoup renforcé les contrôles et les audits durant mon passage à la tête de Michelin.

Tout pouvoir est guetté par l’abus et l’aveuglement. 

En tant que responsable, une méfiance est indispensable. Il faut des mécanismes de contrôle des patrons, comme nous en avons mis en place chez Michelin. En effet, un patron est guetté par les affres de la courtisanerie. C’est délicieux et l’on s’y habitue très vite. Des problèmes peuvent aussi naître quand le patron est coupé de la base et dorloté par une équipe de direction qui a envie de bien se faire voir. C’est humain.

Je me souviens d’un tour de table où, pour voir, j’avais pris une position à laquelle tout le monde s’est progressivement rallié, même si je sentais que ce n’était pas forcément ce qu’ils pensaient. A la fin du tour de table, j’ai volontairement exprimé un point de vue radicalement différent.

Enfin, l’excès de bienveillance peut être un danger. On a besoin de dire que c’est mauvais.

Pour conclure, je dirais que, personnellement, je me suis souvent référé aux quatre vertus cardinales :
– la prudence,
– la force,
– la justice,
– et la tempérance, afin d’agir au mieux dans l’entreprise. »

Tags: , , , , , , , , , , , , , , , , ,

1 Commentaire à Michel Rollier : « en entreprise, un besoin vital de confiance, mais sans aucun angélisme »

  • Jeanne GERARD dit :

    Ces propos sont également applicables dans une classe d’enfants, même en maternelle et, sans doute aussi, à l’éducation de tout enfant.

Répondre à Jeanne GERARD Annuler la réponse

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *